Article
Introduction
Le projet de loi C‑12 propose des mesures significatives visant à renforcer le régime canadien de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité, le financement des activités terroristes et le contournement de sanctions (Régime LRPC). Parmi ces mesures, notons l’inscription obligatoire auprès du CANAFE pour toutes les entités déclarantes, ainsi que de nouveaux outils de conformité améliorés, incluant des pénalités considérablement accrues en cas de non‑conformité. Des modifications ciblées au projet de loi (qui n’en affecteront pas le fond), ainsi que de nouvelles réglementations, sont nécessaires pour atténuer les résultats négatifs qui pourraient compromettre les objectifs politiques visés par le projet de loi.
Recommendations
- Clarifier l’application des pouvoirs de supervision et de conformité proposés par le projet de loi C‑12, dans le but de renforcer l’approche basée sur le risque, préserver l’efficacité des récentes améliorations au Régime LRPC (p. ex., l’échange de renseignements entre entités déclarantes) et éviter l’excès de signalement (générant un volume élevé de rapports peu pertinents qui n’entraînent pas une augmentation des poursuites) :
- Reporter l’entrée en vigueur de l’augmentation des sanctions administratives pécuniaires (SAP) à une date ultérieure à l’établissement des critères du règlement. Cela garantira une application transparente et prévisible des SAP, en réservant les plus élevées aux cas complexes ou systémiques1.
- Ajouter un pouvoir réglementaire afin de confirmer, de façon claire et certaine, que les critères d’évaluation d’un programme de conformité permettent de déterminer si ledit programme est raisonnablement conçu, fondé sur les risques et efficace2.
- Supprimer la limite d’un an pour la prorogation du délai maximal des accords de réparation pour non‑conformité afin d’éviter une application arbitraire de sanctions additionnelles considérables (p. ex., quand le retard échappe au contrôle de l’entité déclarante)3.
- Se fier au jugement de l’entité déclarante pour déterminer si le nom d’un client est « manifestement fictif », car il s’agit d’un exercice très subjectif4.
- Accorder aux banques une exemption de l’inscription obligatoire au CANAFE puisqu’elles sont déjà assujetties à des contrôles5.
- Modifier la proposition relative à l’infraction pour fourniture de faux renseignements afin qu’elle reflète « l’intention de tromper » (conformément à d’autres dispositions similaires du Code criminel) en vue d’éviter le déclenchement d’une infraction lorsque, de bonne foi, on fournit (ou non) des renseignements6.
- Préciser que, comme pour les violations, toute prétendue infraction commise avant l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions proposées dans le projet de loi C‑12 ne sera pas assujettie à ces dispositions7.
Veuillez consulter le texte proposé à l’annexe de cette soumission à la page 3.
Avantages pour les Canadiennes et les Canadiens ainsi que pour l’économie canadienne
L’adoption de ces mesures contribuera au développement d’un Régime LRPC canadien adapté à ses objectifs et basé sur le risque, capable de mieux viser les risques, en concentrant les ressources sur des résultats concrets, tels que les enquêtes, les poursuites et la protection des Canadiennes et des Canadiens.
1 Projet de loi C-12, partie 9, article 116
2 Projet de loi C‑12, partie 9, article 79, LRPCFAT, article 9.6 (1.1)
3 Projet de loi C‑12, partie 9, article 100, LRPCFAT, article 73.16 (3)
4 Projet de loi C‑12, partie 9, article 78, LRPCFAT, article 9.2 (1) et (2)
5 Projet de loi C‑12, partie 9, article 82, LRPCFAT, article 11.4001 (1) et 2
6 Projet de loi C‑12, partie 9, article 108, LRPCFAT, article 77.1 (1)
7 Projet de loi C‑12, partie 9, article 123
Annexe
1. Reporter l’entrée en vigueur des nouvelles sanctions administratives pécuniaires (SAP) à une date ultérieure à l’établissement des critères du règlement. Cela garantira une application transparente et prévisible des SAP, en réservant les plus élevées aux cas complexes ou systémiques.
Des critères de sanctions supplémentaires devraient être ajoutés à l’article 6 du Règlement sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes afin de garantir que les SAP soient appliquées de façon transparente et prévisible, et que les SAP les plus élevées soient appliquées uniquement aux violations systémiques et graves, y compris, mais sans s’y limiter :
- [texte ajouté : La taille et la sophistication de l’entité déclarante (ED);]
- [texte ajouté : Le volume total des transactions et des rapports de l’ED, une attention étant accordée aux violations apparentes par rapport au volume total;]
- [texte ajouté : Les mesures correctives prises par l’ED dès qu’elle a eu connaissance de la violation apparente.]
Le gouvernement devrait également mener des consultations sur les critères réglementaires supplémentaires.
2. Ajouter un pouvoir réglementaire afin de confirmer, de façon claire et certaine, que les critères d’évaluation d’un programme de conformité permettent de déterminer si ledit programme est raisonnablement conçu, fondé sur les risques et efficace.
Pour garantir que cette nouvelle exigence soit appliquée de manière transparente et prévisible, l’amendement suivant devrait être apporté à l’article 79 du projet de loi C‑12 :
- Exigences relatives au programme
9.6 (1.1) Il incombe également à la personne ou entité de veiller à ce que le programme soit raisonnablement conçu, fondé sur les risques et efficace [texte ajouté : conformément aux critères établis par la réglementation].
Le gouvernement devrait mener des consultations sur ces critères réglementaires.
3. Supprimer la limite d’un an pour la prorogation du délai maximal des accords de réparation pour non‑conformité afin d’éviter une application arbitraire de sanctions additionnelles considérables (p. ex., quand le retard échappe au contrôle de l’entité déclarante).
La limite d’un an est préoccupante, car les entités déclarantes sont susceptibles de subir des retards et de s’exposer à des amendes importantes pour diverses raisons échappant à leur contrôle (p. ex., pannes de systèmes techniques du gouvernement du Canada). L’amendement suivant à l’article 100 du projet de loi C‑12 permettra de créer la flexibilité nécessaire pour atténuer ce risque :
- Prorogation du délai
73.16(3) Le Centre peut modifier la transaction afin de proroger le délai visé à l’alinéa (2)b) [texte supprimé : d’une période maximale d’une année] s’il est convaincu que l’intéressé fait des progrès importants par rapport aux conditions de la transaction, de sorte que la prorogation l’encouragerait à se conformer à la présente loi..
4. Accorder toute la transparence et la discrétion nécessaires à l’entité déclarante, plutôt qu’au CANAFE, pour déterminer si le nom d’un client est « manifestement fictif », car il s’agit d’un exercice très subjectif.
L’amendement suivant à l’article 78 du projet de loi C‑12 réduira l’incertitude dans l’interprétation de la disposition proposée sur les comptes anonymes :
- Interdiction : anonymat
9.2 Il est interdit à toute personne ou entité visée à l’article 5 d’ouvrir un compte anonyme ou un compte pour un client anonyme.
- Client anonyme
(2) Pour l’application du paragraphe (1), le client est anonyme si la personne ou entité ne peut vérifier l’identité de celui‑ci en conformité avec les règlements ou si [texte ajouté : la personne ou entité est d’avis que] le nom de celui‑ci est manifestement fictif.
5. Accorder aux banques une exemption de l’inscription obligatoire au CANAFE puisqu’elles sont déjà assujetties à des contrôles.
Le CANAFE est au fait des banques qu’il supervise, car le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF) réglemente les banques et le CANAFE émet directement aux banques les factures de recouvrement des coûts. Pour prévenir tout conflit entre ce régime d’enregistrement et d’autres régimes, tels que celui du BSIF, ainsi que pour éviter les duplications ou les chevauchements, il convient d’apporter l’amendement suivant à l’article 82 du projet de loi C‑12 :
- Obligation de s’inscrire
11.4001 (1) Sous réserve du paragraphe (2), les personnes ou entités visées à l’article 5 s’inscrivent auprès du Centre.
- Exceptions
(2) Le paragraphe (1) ne s’applique pas aux personnes ou entités visées aux alinéas [texte ajouté : 5(a),] 5h), h.1) ou m) ni aux personnes ou entités visées à l’article 5 qui agissent exclusivement à titre d’employés ou de mandataires d’une autre personne ou entité visée à l’article 5.
6. Modifier la proposition relative à l’infraction pour fourniture de faux renseignements afin qu’elle reflète « l’intention de tromper » (conformément à d’autres dispositions similaires du Code criminel) en vue d’éviter le déclenchement d’une infraction lorsque, de bonne foi, on fournit (ou non) des renseignements.
Dans la structure actuelle de la loi, la violation pourrait, de manière non intentionnelle, englober des situations où des renseignements seraient sciemment omis parce qu’ils sont jugés non pertinents sur la base d’une analyse de bonne foi. Cette application potentielle du droit pénal pourrait avoir des répercussions sur l’attraction et la rétention des meilleurs talents dans le domaine de la lutte contre le recyclage des produits de la criminalité (RPC). Dans le but d’éviter cette situation, l’amendement suivant, qui est en accord avec des dispositions similaires du Code criminel (p. ex., articles 386, 389 et 898), devrait être apporté à l’article 108 du projet de loi C‑12 :
- Fourniture de renseignements
77.1 (1) Commet une infraction toute personne ou entité tenue au titre de la présente loi de fournir des renseignements au Centre ou à une personne chargée de l’application de la présente loi et qui fait, [texte ajouté : avec l’intention de tromper,] l’une des actions suivantes :
(a) elle retient sciemment des renseignements importants;
(b) elle fait sciemment une déclaration fausse ou trompeuse, notamment par omission;
(c) elle fournit sciemment des renseignements faux ou trompeurs, notamment par omission.
7. Préciser que, comme pour les violations, toute prétendue infraction commise avant l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions proposées ne sera pas assujettie à ces dispositions.
Pour renforcer la cohérence entre le traitement des violations et des infractions dans les clauses transitoires des articles 121 à 123 du projet de loi C‑12, les modifications suivantes sont proposées :
- Dispositions transitoires
Définitions
121 Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article et aux articles 122 et 123.
- date de référence La date d’entrée en vigueur du présent article. (commencement day)
- ancienne loi La Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, dans sa version antérieure à la date de référence. (former Act)
- nouvelle loi La Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, dans sa version à la date de référence. (new Act)
- Violation [texte ajouté : et infraction] : ancienne loi
122 La partie 4.1 de l’ancienne loi continue de s’appliquer à l’égard de toute violation, au sens du paragraphe 2(1) de l’ancienne loi, qui serait survenue avant la date de référence. [texte ajouté : La partie 5 de l’ancienne loi continue de s’appliquer à l’égard de toute infraction, au sens de la partie 5 de l’ancienne loi, qui serait survenue avant la date de référence]
- Violation [texte ajouté : et infraction] : nouvelle loi
123 Il est entendu que la partie 4.1 de la nouvelle loi s’applique à l’égard de toute violation réglementaire ou de toute violation d’un ordre de conformité, au sens du paragraphe 2(1) de la nouvelle loi, qui serait survenue à la date de référence ou après cette date. [texte ajouté : La partie 5 de la nouvelle loi s’applique à toute infraction prévue par la partie 5 de la nouvelle loi, qui serait survenue à la date de référence ou après cette date.]